IAS 2023 : Guérison probable du VIH après une greffe de cellules souches, lundi 24 juillet 2023

Premier cas probable de guérison du VIH après une greffe de cellules souches sans mutation du CCR5

Genève, Suisse. Crédit photo : olrat/Shutterstock.com.
Genève, Suisse. Crédit photo : olrat/Shutterstock.com.

Un homme surnommé « le patient de Genève » semble être la dernière personne à avoir été guérie du VIH après avoir reçu une greffe de cellules souches dans le cadre d'un traitement contre le cancer. Contrairement aux cas précédents, il a reçu des cellules souches prélevées sur un donneur qui ne présentait pas de mutation CCR5.

Ces résultats ont été présentés lors du 12ème congrès de la Société internationale du sida sur la science du VIH (IAS 2023), qui se tient à Brisbane, en Australie, cette semaine.

L'homme, âgé d'une cinquantaine d'années, a été dépisté séropositif en 1990. Il suivait un traitement antirétroviral depuis 2005. Il a développé un type de cancer rare et agressif et a suivi une chimiothérapie et une irradiation corporelle totale. En 2018, il a reçu une greffe de cellules souches.

Dans les cas précédents de guérison du VIH, les médecins avaient effectué des greffes de cellules souches prélevées sur des donneurs présentant une mutation génétique rare (connue sous le nom de CCR5-delta32). Cette mutation se caractérise par l'absence de corécepteurs CCR5 sur les cellules T, ce qui empêche le VIH de pénétrer dans les cellules. Dans ce cas, aucun donneur compatible présentant cette mutation n'était disponible.

La greffe de cellules souches a réussi. Cependant, l'homme a souffert d'une réaction chronique et aigue du greffon contre l'hôte (GVHD) et a été traité avec des médicaments immunosuppresseurs, notamment du ruxolitinib. Trois ans après la greffe, en novembre 2021, il a commencé une interruption du traitement antirétroviral sous étroite surveillance.

L'homme continue d'avoir un VIH indétectable selon les tests classiques 20 mois après l'arrêt du traitement antirétroviral, et les tests ultrasensibles se sont avérés également négatifs.

Les greffes de cellules souches sont trop risquées pour les personnes qui n'ont pas besoin de traiter un cancer potentiellement mortel, et la procédure est intensive et coûteuse. Néanmoins, chaque nouvelle guérison apporte de nouveaux indices aux chercheurs qui travaillent sur la recherche d'un traitement curatif pour le VIH.


La pitavastatine réduit les risques de troubles cardiovasculaires chez les personnes vivant avec le VIH

Professeur Steven Grinspoon à IAS 2023. Photo de Roger Pebody.
Professeur Steven Grinspoon à IAS 2023. Photo de Roger Pebody.

Une statine fréquemment utilisée réduit les risques de crise cardiaque, d'accident vasculaire cérébral et autres troubles cardiovasculaires lorsqu'elle est administrée à des personnes séropositives auxquelles elle ne serait pas systématiquement prescrite, selon des travaux de recherche présentés cette semaine. Les résultats suggèrent que les statines pourraient potentiellement éviter près d'un événement cardiovasculaire majeur sur cinq ou les décès qui y sont liés.

REPRIEVE, un grand essai de phase III, a été interrompu plus tôt que prévu en avril lorsque les résultats intermédiaires ont montré que la pitavastatine réduisait de 35 % les risques d'événements cardiovasculaires majeurs. Le professeur Steven Grinspoon, de la faculté de médecine de Harvard et de l'hôpital général du Massachusetts, a présenté des résultats détaillés lors de l'IAS 2023, publiés simultanément dans le New England Journal of Medicine.

Un nombre croissant de recherches montre que les personnes vivant avec le VIH sont plus exposées aux risques de maladies cardiovasculaires. Cela peut être dû à une inflammation chronique qui persiste même avec une thérapie antirétrovirale efficace, aux effets indésirables de certains médicaments antirétroviraux et à des taux plus élevés de facteurs de risque traditionnels tels que le tabagisme.

Les maladies cardiovasculaires sont associées à un taux élevé de cholestérol et de triglycérides dans le sang. Les statines réduisent les lipoprotéines de basse densité (LDL), ou « mauvais cholestérol », et sont aussi connues pour leur capacité à réduire l'inflammation. S'il a été démontré que les statines réduisent le risque de troubles cardiovasculaires et de décès dans la population générale, leurs avantages pour les personnes séropositives n'étaient jusqu'à présent pas clairs.

Le recrutement des participants à l'étude REPRIEVE a débuté en 2015. C'est le plus grand essai randomisé sur le VIH jamais réalisé, mené sur 100 sites dans 12 pays d'Amérique du Nord et du Sud, d'Europe, d'Afrique et d'Asie. L'étude a recruté 7 769 personnes séropositives âgées de 40 à 75 ans, avec un âge médian de 50 ans. Près d'un tiers des participants étaient des femmes, 41 % étaient noirs, 35 % étaient blancs et 15 % étaient asiatiques.

Les participants suivaient un traitement antirétroviral et la plupart (88 %) avaient une charge virale indétectable. La plupart suivaient un traitement à base d'un inhibiteur non nucléosidique de la transcriptase inverse (47 %) ou d'un inhibiteur de l'intégrase (26 %). Les participants n'avaient pas d'antécédents de maladie cardiovasculaire, n'avaient jamais pris de statines et étaient considérés comme présentant un risque cardiovasculaire faible à modéré.

Les participants à l'étude ont été répartis au hasard pour recevoir de la pitavastatine par voie orale (4 mg) ou un placebo une fois par jour. L'observance a été jugée très bonne au cours des cinq années de suivi.

Les taux de cholestérol LDL, similaires au départ, ont diminué de 30 % dans le groupe pitavastatine, mais sont restés inchangés dans le groupe placebo.

Les taux de troubles cardiovasculaires majeurs (tels que crise cardiaque ou accident vasculaire cérébral) étaient respectivement de 4,8 et 7,3 pour 1000 personnes-années dans les groupes pitavastatine et placebo. Le taux de troubles cardiovasculaires majeurs était 35% inférieur dans le groupe pitavastatine, soit une réduction plus importante que celle observée dans les études portant sur la population générale.

La pitavastatine a été généralement sûre et bien tolérée. Les effets secondaires étaient similaires à ceux observés dans les études menées auprès de la population générale, et aucun problème d'innocuité imprévu n'a été relevé.

« Cette recherche suggère que les statines pourraient être un moyen accessible et économique d'améliorer la santé cardiovasculaire et la qualité de vie des personnes vivant avec le VIH », a déclaré le Dr Gary Gibbons, directeur de l'Institut national américain du cœur, du poumon et du sang (US National Heart, Lung, and Blood Institute). « Des recherches supplémentaires pourront approfondir ces résultats, tout en offrant des pistes pour les transposer rapidement dans la pratique clinique. »


Un feu orange : la position de l'OMS lorsque la charge virale est inhibée mais détectable

Dr Lara Vojnov à IAS 2023. Photo de Roger Pebody.
Dr Lara Vojnov à IAS 2023. Photo de Roger Pebody.

Les risques de transmission du VIH lorsqu'une personne a une charge virale inhibée mais détectable sont "presque nuls ou négligeables", selon un document publié par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et présenté à l'occasion de l'IAS 2023.  

La Dre Lara Vojnov, Conseillère en diagnostic au sein du Programme mondial de lutte contre le VIH, les hépatites et les IST de l'OMS, a présenté le nouveau document d'orientation de l'OMS intitulé « The role of HIV viral suppression in improving individual health and reducing transmission »  : Le rôle de la suppression virale du VIH dans l'amélioration de la santé individuelle et la réduction de la transmission.

Ce document établit une distinction entre trois catégories de résultats relatifs à la charge virale : "Pas de suppression virale" (plus de 1000) ; "Indétectable", qui peut aller de 0 à 200 selon la sensibilité du test individuel ; et une catégorie intermédiaire, "Suppression virale", où le test détecte le VIH mais à des niveaux faibles qui ne peuvent pas être quantifiés par le test (moins de 1000).

Auparavant, les tests de charge virale étaient considérés comme trop complexes et trop coûteux pour les pays à faibles revenus. Il était plus rentable de s’appuyer sur les symptômes pour les décisions relatives aux changements de traitement. Or, retarder les changements de traitement au moment où les personnes devenaient malades, a conduit au développement de résistances aux médicaments, ce qui a sérieusement limité les options de traitement de deuxième ligne et a coûté des vies.

Il est donc urgent d'introduire la mesure de la charge virale comme partie intégrante du traitement et de la prise en charge du VIH dans tous les contextes. L'utilisation de gouttes de sang séché, plutôt que de plasma, permet de surmonter de nombreuses difficultés logistiques qui ont fait obstacle à la diffusion des tests de charge virale dans les pays à revenu faible et intermédiaire.

Cependant, le seuil clinique de ces tests pour une charge virale définitivement non maîtrisée est de l'ordre de 1 000 copies/ml. En effet, les échantillons utilisés sont plus petits, ce qui conduit à des résultats positifs, en dessous de 1000, mais qui ne peuvent pas être quantifiés - en d'autres termes, le test ne donne pas de valeur numérique précise.

Une charge virale située dans cette fourchette n'est pas fréquente. Une charge virale se situant dans la tranche supérieure des centaines est souvent transitoire, c'est-à-dire qu'elle est soit en train de baisser (lorsqu'une personne commence un traitement et que sa charge virale diminue) soit en train de monter (lorsque le traitement échoue ou qu'il y a des problèmes d'observance qui pourraient conduire à l'échec du traitement).

Par conséquent, la nouvelle catégorie " suppression " peut signaler un problème à venir, à l'instar d'un feu orange. Pour les personnes dont le résultat est "en suppression mais détectable", l'OMS recommande un conseil renforcé en matière d'observance et la répétition d'un test de charge virale trois mois plus tard. Si le résultat est toujours le même, le traitement doit être modifié, car il peut indiquer une faible résistance ou un échec imminent du traitement.

En ce qui concerne la transmission, M. Vojnov a souligné que le message initial de I=I reste inchangé, à savoir que « les personnes vivant avec le VIH qui ont une charge virale indétectable n'ont aucun risque de transmettre le VIH à leurs partenaires sexuels ».

Afin de quantifier le risque de transmission pour la catégorie « suppression » (moins de 1000 mais pouvant être supérieure à 200), Dre. Lara Vojnov et ses collègues ont entrepris un examen des études qui ont mesuré la charge virale et l'ont reliée à des événements de transmission. Cette analyse, publiée la semaine dernière dans The Lancet, n'a identifié que deux cas de transmission où la dernière charge virale enregistrée était inférieure à 1 000 (l'un sur 617 et l'autre sur 872).

Elle conclut que « les personnes vivant avec le VIH dont la charge virale est en suppression ont un risque presque nul ou négligeable de transmission à leurs partenaires sexuels ».


Le traitement du VIH dans l'utérus a permis à cinq bébés mâles de rester indétectables grâce au traitement antirétroviral.

Dre Gabriela Cromhout à IAS 2023. Photo de Roger Pebody.
Dre Gabriela Cromhout à IAS 2023. Photo de Roger Pebody.

Une étude sud-africaine présentée à l'IAS 2023 a identifié cinq bébés garçons nés avec le VIH qui ont arrêté le traitement antirétroviral plus tard et dont la charge virale est restée indétectable. Cette étude montre que, même dans l'utérus, les antirétroviraux peuvent commencer à agir en tant que traitement des enfants séropositifs et met en évidence les différences entre les sexes en ce qui concerne le contrôle après le traitement.

Au cours de la dernière décennie, plusieurs cas déclarés d'enfants ayant une charge virale indétectable pendant des mois, voire des années, ont été signalés, souvent après seulement un traitement antirétroviral de courte durée.

La Dre Gabriela Cromhout, de l'Université du KwaZulu-Natal, a émis l'hypothèse que le contrôle post-traitement chez les enfants pourrait être plus répandu qu'on ne le pensait jusqu'à présent. En 2015, Gabriela Cromhout et ses collègues ont mis en place une étude de cohorte longitudinale, qui comprend actuellement 281 mères dont les enfants sont nés avec le VIH. Les bébés ont été suivis depuis leur naissance.

De nombreuses mères ont été diagnostiquées séropositives et ont commencé un traitement antirétroviral tardivement au cours de leur grossesse, tandis que d'autres ont eu du mal à adhérer à ce traitement. Néanmoins, 92 % des nourrissons avaient reçu des ARV de leur mère avant la naissance, par transfert placentaire.

Parmi les enfants nés avec le VIH en Afrique du Sud, les charges virales sont aujourd'hui nettement inférieures à celles qu'on connaissant avant l’ère des antirétroviraux, et plus encore depuis le passage à des traitements à base de dolutégravir, un médicament particulièrement puissant. Dans cette cohorte, la charge virale moyenne à la naissance était de 6 950 chez les nourrissons dont les mères avaient pris du lopinavir boosté, mais de 1 700 avec l'utilisation du dolutégravir et de moins de 1 000 chez les garçons.

Bien que tous les bébés aient commencé un traitement antirétroviral, l'observance du traitement a été irrégulière pour un grand nombre d'entre eux. Trois ans après la naissance, 37 % des mères et des bébés avaient abandonné l'étude et 23 % avaient une charge virale détectable persistante. Cependant 40 % avaient un virus inhibé, dont 19 % avec une charge virale indétectable persistante (inférieure à 20), sans "blips".

L'étude a mis en évidence des différences entre les sexes en ce qui concerne le contrôle post-traitement. Cinq bébés ont conservé une charge virale inférieure à 20 bien qu'ils n'aient pas pris de traitement antirétroviral, ou très peu, au plus tard deux mois après la naissance. Ces cinq bébés étaient des garçons, alors que 60 % des bébés de l'étude étaient des filles.

L'enfant qui a eu une charge virale indétectable le plus longtemps a cessé de prendre un traitement antirétroviral à l'âge de 40 mois (3 ans et 4 mois) et a maintenant cinq ans. Les quatre autres ont repris le traitement antirétroviral, mais trois d'entre eux sont maintenant inscrits dans une étude analytique d'interruption du traitement, dans le cadre de laquelle ils cesseront de prendre le traitement antirétroviral sous surveillance pendant une période prédéfinie.

Des différences ont été observées entre les types de virus contractés par les filles et les garçons. Le VIH des filles avait tendance à être pharmaco-résistant ou moins sensible aux interférons de type 1, ce qui indique que ces défenses immunitaires innées ne fonctionneraient pas aussi bien contre ces virus. Le VIH des garçons a tendance à être sensible aux interférons de type 1, ce qui signifie que les défenses immunitaires fonctionnent bien contre eux.

Si la réponse à l'interféron de type 1 influence le type de virus acquis par les garçons, les traitements qui renforcent cette réponse pourraient réduire la gamme des virus transmissibles et avoir un effet préventif, du moins chez les enfants.


Analyse des données par Clinical Care Options

Clinical Care Options

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